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Et si on faisait pousse nos isolants?

Écrit par Québec habitation

Champignons, carottes, maïs, chanvre… Non, ce n’est pas une liste d’épicerie, mais bien celle des ingrédients entrant dans la fabrication de nouveaux matériaux d’isolation biosourcés!

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) et le programme des Nations Unies pour l’environnement (UNEP) ont statué, dans leur rapport global de 2018, que le secteur de la construction est responsable de 36 % de l’énergie consommée mondialement, et de 40 % des émissions de gaz à effet de serre. Bien que ces chiffres soient stables, il n’en reste pas moins que le secteur de la construction est celui avec le plus fort impact environnemental.

Le choix des matériaux

À titre de professionnels du bâtiment, quels moyens pouvons-nous prendre pour réduire ce bilan? Abordant différentes problématiques, les étudiants de la Chaire industrielle de recherche sur la construction en bois (CIRCERB) de l’Université Laval tentent d’y répondre. De mon côté, cela passe par le choix des matériaux qui constituent l’enveloppe du bâtiment. Mes travaux de thèse m’ont amenée à étudier les options d’isolants biosourcés, certains déjà disponibles sur le marché et d’autres encore à l’échelle laboratoire, mais qui sauront certainement piquer votre curiosité!

La demande actuelle en matériaux est concentrée sur des productions de matières premières végétales demandant un long temps de croissance, ou de productions industrielles à consommation énergétique élevée. Également, une forte proportion des produits composites retrouvés sur le marché génère une pollution nocive et possède une importante longévité post-consommation. De là vient la nécessité de développer des matériaux requérant peu d’énergie lors de leur production, mais également lors de leur traitement en fin de vie.

Un matériau isolant à base de champignons

Répondant à ce besoin, l’entreprise Ecovative fabrique un matériau isolant à base de champignons, le Mycofoam. Le composite est formé d’un substrat de particules nutritives inoculées par une souche fongique.

La matière première peut prendre la forme de résidus agroforestiers de toutes sortes. C’est en digérant le substrat que le champignon génère des hyphes qui s’interconnectent pour former un réseau de mycélium grandissant au travers des particules. Seule l’étape de la préfructification du champignon est utilisée dans le composite afin de prévenir l’exposition aux spores. La croissance est donc arrêtée lors de la déshydratation dans un four à des températures supérieures à 125 °F. Le produit fini peut être moulé afin de remplir la fonction d’emballage, ou encore offert sous la forme de blocs usinables. Avec une valeur de résistance thermique pouvant atteindre 3,6 R/po, l’attrait est réel chez les constructeurs de maisons écologiques.

Isolant composite de bois et mycélium, la racine filamenteuse des champignons.

Le bois, une bonne solution

Au Québec, le bois est adopté comme solution structurale simple, rapide et abordable. Lorsqu’il provient de peuplements gérés selon des principes de foresterie durable, la récolte et la transformation du bois engendrent un impact environnemental faible. Le scénario devient encore plus intéressant lorsqu’on s’attarde à ses multiples possibilités en fin de vie. Favorable à une économie circulaire, le bois peut être recyclé en panneau de fibres isolant.

L’entreprise MSL, située à Louiseville, a mis sur le marché un panneau de fibres de bois recyclées, le SONOclimat ECO4, d’une valeur de résistance thermique R4. Le panneau étant issu d’un procédé humide, l’eau est maintenue dans un circuit fermé limitant les déchets de production. Cette eau, tout comme dans un procédé papetier, est à la base des liens formés entre les fibres de bois. Sans colle synthétique, le panneau démontre un haut taux de contenu biosourcé. Avec une densité supérieure aux isolants traditionnels, le panneau SONOclimat ECO4 peut être utilisé en tant que panneau intermédiaire dans l’enveloppe.

Résistance thermique relative

Résistance thermique relative
Résistance thermique relative

Les fibres naturelles comme isolants biosourcés

Fréquemment choisie comme solution d’isolation dans les habitations, la laine minérale insérée entre les colombages des murs se voit elle aussi concurrencée par un nombre grandissant d’options biosourcées. Lorsque fabriqués à l’aide d’un procédé sec, les matelas en fibres naturelles gagnent en épaisseur. Un liant solide sous la forme de fibres de polymère est mélangé avec les fibres végétales et permet d’obtenir un réseau tridimensionnel aéré. Ces espaces d’air au travers de la structure ralentissent le transfert de chaleur et favorisent la qualité d’isolation thermique.

Bien établie sur le marché européen, l’entreprise STEICO présente maintenant aux constructeurs québécois une large gamme d’isolants en fibres de bois. Pour sa part, l’entreprise Nature Fibres, située à Asbestos, valorise une plante dont la culture ne cesse de croître, le chanvre. Lorsque testés en laboratoire, les produits STEICO flex036 et Naturchanvre ont démontré une résistance thermique se rapprochant de la laine minérale et du polystyrène expansé, soit une valeur R/po légèrement inférieure à 4.

Un fort avantage des isolants en fibres naturelles est leur perméance à la vapeur. Contrairement aux isolants plastiques à structure cellulaire, la vapeur d’eau peut diffuser au travers du matelas et s’échapper de l’enveloppe. Un autre point non négligeable à aborder avec les isolants biosourcés est leur comportement au feu. Présentant un temps d’ignition plus court que le polystyrène expansé graphité, la combustion totale des isolants en fibres de bois ou de chanvre s’effectue également plus rapidement et dégage moins de chaleur. L’énergie libérée étant moindre, le risque et la vitesse de propagation de l’incendie peuvent être diminués. Par ailleurs, les fibres naturelles produisent une quantité significativement moindre de fumée que les isolants plastiques. Il s’agit d’un point rassurant, considérant que le taux de visibilité associé à la fumée dans l’air est un élément critique de la sécurité incendie.

Nous sommes à un point où les isolants biosourcés se démocratisent et ne sont plus associés exclusivement aux projets nichés de la construction écologique. Afin de rivaliser avec les isolants traditionnels, les travaux de recherche s’orientent vers une amélioration de la performance technique, sans néanmoins influencer à la hausse les coûts de production et l’impact environnemental. Comme tout matériau, les isolants biosourcés ont des forces et des faiblesses. Il s’agit simplement de les connaître, de cibler le bon produit pour la bonne application et de faire une conception adéquate!

Collaboration spéciale de la Chaire industrielle de recherche sur la construction écoresponsable en bois (CIRCERB) de l’Université Laval

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Québec habitation

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